Les ministres de l’Économie et des Finances de l’Union européenne ont allégé la liste des paradis fiscaux avec le retrait d’Anguilla, de La Dominique et des Seychelles. Désormais, seuls neufs pays restent sur la liste noire.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le timing choisi n’est pas le plus opportun. Les ministres de l’Économie et des Finances de l’Union européenne ont décidé mardi d’alléger la liste des paradis fiscaux avec le retrait d’Anguilla, de La Dominique et des Seychelles, en plein scandale des Pandora papers.
Cette liste noire de l’UE comprend désormais neuf territoires : les Samoa américaines, les Fidji, Guam, les Palaos, Panama, le Samoa, Trinité-et-Tobago, les Îles Vierges américaines et le Vanuatu.
En principe, cet instrument européen est censé lutter contre l’évasion fiscale des multinationales et des grandes fortunes. Il avait été créé en décembre 2017 après plusieurs scandales, dont les « Panama Papers » et « LuxLeaks ». Dans ce cas, les pays « blacklistés » peuvent faire l’objet de sanctions comme notamment le gel de fonds européens.
« Intraitable » avec les fraudeurs
Anguilla, la Dominique et les Seychelles qui étaient auparavant dans cette liste ont pu en sortir car ils se sont engagés à des réformes pour répondre aux demandes de transparence de l’UE.
Cette annonce intervient au moment où l’enquête Pandora Papers, publiée dimanche, a révélé des liens entre des actifs offshore et 336 dirigeants, sportifs et responsables politiques de premier plan, qui ont créé près de 1 000 sociétés dont plus des deux tiers aux Iles Vierges britanniques mais aussi précisément aux Seychelles…
Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie sur RTL a affirmé vouloir être « intraitable » avec les fraudeurs en France et qu’une « task force » va être mise en place pour les traquer.
En attendant, cette liste fait toujours débat. Elle « devrait pénaliser les paradis fiscaux. Au lieu de cela, elle les laisse s’en tirer à bon compte. La décision d’aujourd’hui de retirer Anguilla, la seule juridiction restante avec un taux d’imposition de zéro pour cent, et les Seychelles, qui sont au cœur du dernier scandale fiscal, fait de la liste noire de l’UE une plaisanterie », s’est étranglée Chiara Putaturo, experte en fiscalité européenne de l’ONG Oxfam.
Des pays échappent à la liste noire
Paolo Gentiloni, le commissaire européen a toutefois défendu cette liste tout en reconnaissant qu’elle ne fonctionnait « pas complètement ». « Nous savons tous que les paradis fiscaux trouvent toujours de nouveaux moyens d’éviter les impôts », a-t-il lancé en ajoutant que « les critères » pour épingler les États non coopératifs « pourraient être discutés » à l’avenir. « Si une législation plus stricte pouvait être approuvée, j’y serais toujours favorable », a-t-il lancé.
Selon les détracteurs, des pays ne sont pas dans la liste noire alors qu’ils refusent notamment de respecter l’échange automatique d’informations fiscales. C’est le cas de la Turquie. Les 27 ont demandé à Ankara « des pas supplémentaires même si des progrès ont été accomplis ». Par ailleurs certains pays y compris à l’intérieure de l’UE ne jouent pas totalement le jeu de la transparence comme l’Irlande, le Luxembourg, Malte ou les Pays-Bas.
Et puis le scandale des Pandora papers vient aussi de révéler que le Royaume-Uni est le « principal acteur » de l’évasion fiscale mondiale. Le directeur de l’ONG britannique Tax Justice Network, Alex Cobham, a dénoncé la responsabilité de Londres, selon lui à la tête du « plus grand réseau mondial de paradis fiscaux » grâce notamment à ses territoires d’outre-mer, dans l’évitement fiscal massif.
L’enquête a aussi mis en lumière des paradis fiscaux aux États-Unis comme le Dakota du Sud ou le Nevada, le Delaware, État dont Joe Biden a été sénateur pendant 36 ans où le secret fiscal reste protégé avec des régimes fiscaux avantageux pour attirer des fonds.